Il a pris racine dans les consciences collectives et fleurit, nationalement comme dans la région Sud PACA avec l’exemple de Solliès-Pont, pour réinventer le paysage urbain. Pour saisir tout l’intérêt de l’éco-quartier, nous avons recueilli les témoignages engagés et passionnés de deux professionnels porteurs du projet des Allées du Château à Solliès-Pont. Diane Renouard-Directrice d’Études et Développement au sein de l’agence Even Conseil groupe CITADIA SCET- en charge de la stratégie environnementale à l’échelle de l’éco-quartier pour la ville et pour l’aménageur Nexity Ville et Projet (Démarche éco-quartier-label national et Démarche QDM-démarche régionale); et Jean-Jacques Babou- Chef de projet au sein de l’agence Sud Est d’Even Conseil- en charge de la démarche “bâtiment” pour le promoteur Nexity Immobilier (il accompagne la conception et la veille à la validation de la performance du bâti par l’obtention des certifications BDM niveau argent-démarche régionale, et Label E+C- préfiguration de la future réglementation environnementale RE2020-EC21 pour l’ensemble et E3C1 pour l’îlot démonstrateur).
QUELLE EST L’ORIGINE DE LA DÉMARCHE ÉCO-QUARTIER?
Diane Renouard: Plusieurs origines à cette démarche. Le préalable, c’est une demande et un contexte. À travers le monde, 1 million de personnes par semaine déménage en ville, lieu concentrant la consommation d’énergie, d’eau et la production CO2. Et justement, 1 personne sur 7 vit dans des bidonvilles. Pour le cas de la France, on a un phénomène d’artificialisation des sols important depuis les années 50/60, où on a plus que doublé la consommation de notre surface agricole, surtout pour y mettre du logement. C’est le rêve de chacun de vouloir sa maison, sa piscine, son propre espace… On construit ainsi de façon étalée et démesurée, pas toujours de façon cohérente; Le région PACA n’échappe pas à la règle. Il fallait donc une solution à la fois collective et durable, qui s’inscrive dans les nouveaux enjeux de notre société.
QUELLES SOLUTIONS APPORTE T-IL?
D.R.: La philosophie est de venir recréer un espace de ville dense, qui correspond aux aspirations des gens qui vont l’habiter. On s’est rendu compte que des villes où on venait radicalement différencier l’habitat du travail et du commerce ne fonctionnaient pas, en terme de trafic, de pollution… On concentrait de façon pendulaire les problèmes. L’éco-quartier repense une ville mixte, comme on avait auparavant dans les villages: l’habitat, les commerces, bureaux, les services de proximité, le tout conjugué à une certaine modernité. On ne consomme plus de la même façon, on n’exploite plus l’espace public de la même façon. On retrouve donc des établissements scolaires, des services, des mobilités douces, collectives. La voiture n’est pas exclue mais pas forcément la bienvenue. C’est un urbanisme de rencontre, dans un climat urbain apaisé. En somme, un morceau de ville riche humainement, où se croisent des enfants, des actifs, des retraités.
QUELLES EN SONT LES CARACTÉRISTIQUES ÉCOLOGIQUES?
D.R.: Pour nous, un éco-quartier, c’est avant tout un morceau de ville. Un gros travail de concertation est mené avec l’ensemble des acteurs qui font la ville (municipalité, services de l’état, riverains, urbanistes, architectes, promoteurs). La création d’un éco-quartier va réquisitionner les sujets de mobilités, de gestion de l’eau, de gestion des déchets. Des sujets qui vont au delà de la limite géographique du terrain à aménager ou réaménager. Généralement, ce genre de quartier est composé de bâtiments certifiés avec des normes écologiques fortes, qui consomment nettement moins que l’énergie conventionnelle des bâtiments anciens ou juste réglementaires. Avec les économies d’énergie, les évolutions réglementaires nous poussent maintenant à utiliser de plus en plus de matériaux biosourcés (issus du vivant). Le résultat est un éco-quartier sur lequel les matériaux utilisés auront un faible poids carbone.
Jean-Jacques Babou: Aujourd’hui nous devons intégrer l’économie circulaire dans l’acte de bâtir. L’économie circulaire, c’est produire tout en limitant les consommations, les gaspillages, l’usage de matières premières par la ré-introduction de ce qui était des déchets par exemple, ou par des matériaux du site ou encore des matériaux biosourcés. Un écoquartier est un projet de société qui réunit tous les intervenants autour de la table, les promoteurs, la ville, des citoyens. C’est un urbanisme sur lequel le citoyen est amené à réagir et à proposer.
DES EXEMPLES CONCRETS?
D.R.: L’éco-quartier de Solliès-Pont est né d’une volonté municipale (entre 2009 et 2012 lors des premiers appels à projet d’écoquartier), de proposer une démarche environnementale de l’urbanisme et fonder un comité consultatif avec les citoyens. Cela a été possible parce qu’en très peu de temps à l’échelle urbaine, il y a eu un vrai travail et un intérêt commun entre le promoteur Nexity et la ville à développer un projet de qualité.
J-J.B.: La différence fondamentale avec un projet dans un centre-ville existant, qui doit donc composer avec l’urbanisme déjà défini, est que sur un éco-quartier, tout est à créer. Le plan de masse défini est orienté vers un fonctionnement bioclimatique des logements. Le dessin du projet vise à tisser une relation entre les bâtiments et leur environnement. Par rapport aux choix constructifs, l’intérêt de réduire l’empreinte carbone en trouvant des ressources locales a eu pour résultat l’intégration de produits ultra performants, comme le béton bas carbone, un matériau intégrant des laitiers d’aciéries. La fibre de bois fait également partie des matériaux biosourcés que nous avons utilisé pour isoler les bâtiments. Sur une partie nous allons également avoir recours au bois: pour certaines menuiseries extérieures, ainsi qu’une partie des protections solaires (garantes du confort estival), notamment les volets.
D.R.: L’aménageur, le promoteur et la ville ont pris un engagement envers les habitants et tout le monde, élus, professionnels et citoyens, suit les ouvrages et la performance du quartier. C’est donc sans hésiter que chacun a mis en place tous les moyens humains et techniques pour la réussite de cette opération. Cela passera notamment par un suivi du fonctionnement du quartier et de la performance de ses bâtiments quelques années après la livraison de l’opération.
QUEL AVENIR GRÂCE À CELA?
J-J.B.: L’éco-quartier répond à un projet urbain cadré à plusieurs échelles. Tout ce qui va être construit est planifié, on connaît déjà le nombre maximum de personnes, de bâtiments, d’étages. L’étude d’impact a évalué le projet pour anticiper sa construction à l’échelle de la ville mais plus généralement de l’agglomération. C’est cette conception globale qui permet de repenser l’espace, de l’économiser, de l’optimiser.
D.R.: Une nouvelle façon de voir la ville. Les gens sont victimes de la ville avec ses nuisances acoustiques, sa pollution, ses embouteillages. L’éco-quartier est là pour réconcilier les gens avec la ville. Et à terme, c’est la solution propice à la limitation de l’artificialisation des sols. Il en va d’une responsabilité individuelle et collective de se soucier de notre patrimoine foncier commun, pour que nos villes restent désirables, fonctionnelles et adaptées à notre temps mais aussi au futur. L’éco-quartier répond à un besoin de changer, d’éveiller nos consciences, de se rapprocher de la nature, de gagner en proximité de services, de se déplacer autrement… et vivre en pleine conscience des enjeux climatiques auxquels notre civilisation doit faire face.
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